Changement climatique
planète en danger
ou espèce humaine en danger?

Voilà plusieurs années que je tiens à jour ce dossier sur le changement climatique. Il va de pair avec le dossier sur le développement durable que j'ai commencé peu après la conférence internationale de Rio de Janeiro, en 1993 lors d'une mission au Brésil pour la sidérurgie brésilienne.

Mais le sujet doit aussi être rapproché de la croissance de la population humaine qui atteint aujourd'hui 6.5 milliards d'habitants et si la tendance observée aujourd'hui continuait nous serions 13 milliards en 2050. Et la croissance de la population doit être rapprochée des origines de la vie et l'évolution jusqu'à Homo.sapiens.sapiens, homme moderne deux fois sapiens et sa dissémination sur toute la planète sans doute depuis l'Afrique, il y a 80 000 ans.

Notre espèce est la seule du genre homo, les autres sont disparues, victimes d'un environnement hostile auquel elles étaient mal adaptées, ou exterminées par notre espèce, si prompte à s'entretuer et à détruire toute forme de vie qui nous concurrence.

L'évolution nous a dotés d'un cerveau particulièrement performant; c'est sans doute le trait qui nous permet de nous adapter à notre environnement. Mais ce cerveau nous permet surtout de communiquer entre nous notre vision du monde, par la parole et le langage articulé, et ainsi d'agir collectivement de manière efficace sur notre environnement, et plus encore de transmettre savoirs et savoirs faire, de générations en générations. Au processus d'évolution génétique basé sur la reproduction et sur le sexe, nous avons donc ajouté un processus d'évolution culturelle beaucoup plus rapide.

Jusqu'à présent, nous avons connu trois grandes périodes au cours de notre évolution culturelle qui se superpose à notre évolution génétique. Au cours de la première période qui a duré grosso modo 90 000 ans, nous étions chasseurs cueilleurs; nous tirions notre subsistence de la chasse et de la récolte de végétaux, comme la plupart des autres espèces animales. Nous avons appris à fabriquer les outils nécessaires pour être plus performants et nous avons appris à agir collectivement de manière de plus en plus efficace. A partir de -35 000 ans avant le présent (AP), nous avons laissé des traces d'acculturation c'est à dire des outils sophistiqués, répétitifs dans leur forme et suggérant des fonctions précises, et surtout nous avons laissé des représentations picturales d'animaux qui nous entouraient. Ces manifestations de notre cerveau et de l'accumulation de savoirs et de savoirs faire, sont la preuve que nous étions capables d'aller loin dans le processus d'évolution culturelle.

Mais sans doute que les conditions environnementales ne nous étaient pas encore assez favorables; la planète était encore dans un âge glaciaire de la fin du pleistocène. Le climat a commencé à se réchauffer vers -10 000 ans AP et c'est alors qu'a commencé la deuxième grande période de notre évolution culturelle, le passage à l'agriculture et à l'élevage, c'est à dire la domestication de plantes et d'animaux. Aujourd'hui, la quasi totalité de la population de la planète est passée à l'agriculture et à l'élevage pour assurer sa subsistance. Cette période de notre évolution a duré grosso modo jusqu'à -250 ans AP c'est à dire jusqu'en 1750. Pendant ce temps, nous avons appris à domestiquer les plantes et les animaux qui nous servent de nourriture pour survivre et nous reproduire, nous avons appris à coder, par l'écriture, les langages par lesquels nous communiquons nos savoirs et savoirs faire, nous avons inventé l'imprimerie ce qui a permis une plus grande diffusion de nos savoirs.

C'est sur le continent eurasiatique, le plus étendu et disposé d'Est en Ouest à des latitudes similaires, ce qui permettait la diffusion de techniques agricoles et d'élevage sans problèmes d'adaptation, que les progrès de l'humanité ont été les plus grands; puis recherchant d'autres horizons, les européens ont découvert les Amériques, ou plutôt ils les ont redécouverts en traversant les océans, car Homo.sapiens.sapiens avait peuplé les Amériques 20 000 ans avant depuis l'Asie en passant par le détroit de Behring.

C'est à partir de 1750 que tout a changé et s'est accéléré; jusqu'alors, nous dépendions de notre force musculaire, d'énergies animales et de combustibles renouvelables comme le bois de nos forêts, pour exercer nos activités. Nos effectifs étaient limités par la mortalité infantile, la mort des femmes en couches, les maladies et les épidémies, phénomènes naturels qui affectent toutes les espèces animales dont nous faisons partie intégrante, quelle que soit la puissance de notre cerveau. Mais l'accumulation des savoirs et des savoirs faire et notre maîtrise de l'agriculture et de l'élevage, permettaient peu à peu la croissance de nos effectifs.

A partir de 1750 nous sommes entrés dans une période d'évolution que l'on qualifie d'industrielle. Tout a changé car nous avons commencé à utiliser les combustibles fossiles, d'abord le charbon qui est resté le combustible principal jusqu'au milieu du XXè siècle; puis le pétrole utilisé en petite quantité dès la fin du XIXè siècle, mais dont la prédominance s'est imposée après la deuxième guerre mondiale, c'est à dire après 1950.

Les combustibles fossiles résultent de l'accumulation des restes d'organismes vivants pendant des millions d'années. Il faut 100 m de sédiments organiques pour faire une couche de 1 m de charbon. C'est dire le temps qu'il a fallu pour constituer les énormes réserves de charbon de par le monde, réserves qui sont à peine entamées. Ces formations se sont produites durant tout le temps géologique et continuent aujourd'hui sous nos yeux dans les marécages, les tourbières. D'autres combustibles fossiles à peine utilisés aujourd'hui sont les schistes bitumineux dont on peut extraire du pétrole. Mais le principal combustible fossile aujourd'hui est le pétrole car il est le plus facile à produire, et le plus facile à transporter car liquide et à utiliser. Depuis peu, il est associé au gaz qui lui est encore plus facile à extraire, et à utiliser mais il a fallu développer avant des techniques pour le stocker et le transporter.

L'utilisation des combustibles fossiles, le charbon d'abord pendant 200 ans, puis le pétrole et plus récemment encore le gaz - en France, on a commencé par le gaz de Lacq, puis on est passé au gaz de Hollande, et aujourd'hui à celui de Norvège et de Russie et tout cela a commencé dans les années 1970 -, a permis un prodigieux développement économique, la multiplication par 5 depuis les années 1950 de la production intérieure brute, par 9 depuis le début du XXè siècle; et surtout cela a permis la formidable croissance de la population mondiale, les peuples les moins développés industriellement bénéficiant des progrès de la médecine et de l'économie pour réduire la mortalité infantile, et augmenter l'espérance de vie de leur population tout en conservant encore maintenant, des taux de fécondité par femme très élevés ce qui provoque un accroissement naturel élevé.

Si l'agriculture et l'élevage se sont imposés partout sur la planète car commencés il y a 10 000 ans AP, l'industrialisation n'a pas encore conquis toute la planète car commencée il y a seulement 250 ans; mais le processus progresse de manière spectaculaire avec la montée en puissance de la Chine et de l'Inde les plus peuplés. Et le processus va continuer.

Toujours plus de population humaine et d'industrialisation sur la planète, c'est plus de terres défrichées pour exercer l'agriculture et l'élevage, c'est plus de forêts détruites, c'est plus d'espaces occupés par l'homme pour ses monocultures et ses élevages; et en transformant les habitats des autres espèces animales qui les occupaient, l'homme conduit à l'extinction ces espèces; il en est ainsi des grands singes, des grands mammifères rhinoceros, éléphants, tigres, lions, guépards, jaguars, et de bien d'autres encore. Il en est de même sur les mers où la pêche industrielle permise par les combustibles fossiles conduit à la raréfaction des ressources halieutiques.

La surpopulation mondiale, le progrès des sciences et des techniques et l'emploi de combustibles fossiles comme principale source d'énergie nous font percevoir que nous atteignons les limites de la planète. Nous percevons un changement du climat, réchauffement, fonte des glaciers des banquises et des calottes glaciaires, élévation du niveau des mers, fréquence accrue des événements météorologiques d'extrême violence. Tout cela est mis en relation avec les émissions de gaz à effet de serre dont principalement le CO2 et le méthane, dont la hausse est quasi verticale depuis 50 ans.

Ce changement climatique menace d'affecter l'environnement qui a permis notre prodigieuse ascension parmi les autres espèces vivantes. Le changement est-il naturel ou est-il provoqué ou aggravé par nos activités, c'est que nous cherchons à comprendre notamment par les explorations des calottes glaciaires par carottages effectués sur 3 000 m dans les régions polaires. On commence à comprendre que des variations très importantes de concentrations en CO2 se seraient produites au cours du pleistocène et ce sur des périodes de temps très courtes de l'ordre de quelques décennies. C'est peut-être une variation rapide de ce genre qui a permis le passage à l'agriculture et à l'élevage il y a -10 000 ans AP, car nous avons donné des preuves d'acculturation dès -35 000 ans AP et nous étions sans doute capables de passer à l'agriculture et à l'élevage si les conditions environnementales l'avaient permis.

Ce qui est inquiétant c'est la variation importante et très rapide du CO2 dans l'atmosphère; plus inquiétant encore, le réchauffement climatique s'il se poursuit pourrait provoquer un dégel des permafrosts aux latitudes proches du pôle nord provoquant l'émission de méthane ce qui aggraverait encore le phénomène. Et le réchauffement des océans pourrait provoquer la libération de méthane enfoui au fond des océans.

La question qui se pose aussi est pourquoi les puits habituels de captage du CO2 ne fonctionnent pas? Les grands gisements de charbon au carbonnifère, et de pétrole, les grands dépôts sédimentaires calcaires du jurassique et du crétacé se sont formés à partir du CO2 de l'atmosphère qui était probablement plus élevé encore qu'aujourd'hui.

Malgré ces interrogations, l'inquiétude demeure. Les appels à la sauvegarde de la planète se multiplient. Mais la planète est-elle vraiment menacée, N'est ce pas l'espèce humaine qui est menacée? Car la planète regorge de vie sous toutes les formes, de vie qui s'adapte sans cesse, qui se réplique se multiple et évolue depuis près de 4 milliards d'années. Toutes les formes de vie sont étroitement interliées, chacune dépendant d'une ou plusieurs autres pour se nourrir, atteindre l'âge de la reproduction, transmettre ses gènes, et mourrir. Nous ne connaissons qu'une infime partie des formes de vie qui se sont développées sur la planète depuis près de 4 milliards d'années. Si, à cause de nos activités, de l'émission de gaz à effet de serre, et du réchauffement climatique que cela provoque, nous modifions notre environnement, c'est nous les premiers qui en serons affectés, avec possibilité de réduction drastique de nos effectifs, voire de notre extinction. La planète restera et la vie continuera, tant qu'il y aura du soleil, de l'eau, de l'oxygène de l'azote et du CO2 dans l'atmosphère, sans doute pendant 4 milliards d'années de plus.

Après la chasse/cueillette qui a duré 90 000 ans, la révolution agricole qui a duré 10 000 ans, la révolution industrielle qui a duré 250 ans, nous entrons dans une révolution environnementale; nul ne sait si elle ne se terminera pas par l'extinction de notre espèce. Ce qui est en jeu c'est la modification de l'atmosphère, condition de notre existence en tant qu'espèce singulière qui occupons toute la planète, les autres espèces animales et végétales n'occupant que des "niches".

Reste à espérer que par la technique et le changement de nos comportements, nous parviendrons à arrêter la course infernale vers notre destin. Al Gore et Richard Branson ont annoncé cette semaine (février 2007) qu'ils faisaient appel à tous les inventeurs du monde pour développer une technologie permettant de capter le CO2 de la combustion des énergies fossiles. Ils offrent un prix de 25 millions de dollars. Sir Richard Branson a annoncé qu'il dépenserait 10 milliards de dollars dans les 10 prochaines années pour combattre le réchauffement climatique. Voir video d'Al Gore et Richard Branson (attention pub avant le début de la vidéo; patience...)


Mis en ligne le 05 février 2007 par Pierre Ratcliffe Contact: (pratclif@free.fr)    site web: http://pratclif.free.fr