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  2. Théorie de l’auto-organisation critique
  3. Self-organized criticality
  4. "Autour de Per Bak : les systèmes critiques auto-organisés"
  5. États critiques auto-organisés: le livre de Per Bak : "Quand la nature s’organise"
  6. Per Bak: How Nature works
  7. Per Bak, physicien théorique Danois
  8. Auto-organisation
    L'auto-organisation est un phénomène de mise en ordre croissant, et allant en sens inverse de l'augmentation de l'entropie; au prix d'une dissipation d'énergie qui servira à maintenir cette structure.
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  10. Théorie du chaos
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Al Gore Urgence planète terre
l'esprit humain face à la crise écologique

Extrait du livre: "Conclusion"

Voici la conclusion du livre d'Al Gore "Urgence planète terre; l'esprit humain face à la crise écologique". Je me sens tellement en phase avec ces propos que mon émotion est intense. Chacun y trouvera je crois les mêmes émotions.

La vie n'est que changement et mouvement. Nourris par les fruits du soleil, du sol, de l'eau et de l'air, nous ne cessons de grandir et de créer, de détruire et de mourir, de cultiver et d'organiser. Au fur et à mesure que nous changeons, le monde change avec nous. La communauté des hommes devient chaque jour plus nombreuse et plus complexe, et exige toujours plus de la nature. Chaque jour, nous puisons plus profondément dans les ressources de la Terre, nous en utilisons davantage et nous produisons aussi plus de déchets de toutes sortes. Le changement engendre le changement et se nourrit de son élan propre, au point que le globe paraît se précipiter toujours plus vite vers une transformation fondamentale.

J'ai décrit dans les pages qui précédent deux types de changements : le changement lent et graduel qui caractérise nos vies quotidiennes, et celui, rapide et radical, qui se produit quand un système bascule, comme par surprise, d'un état d'équilibre à un autre. Mais il existe un troisième type de changement, qui combine des éléments des deux premiers. Un de ses aspects fait l'objet d'une théorie nouvelle, celle des états critiques auto-organisés, avancée par Per Bak et Kan Chen, physiciens au laboratoire national de Brookhaven.

Bak et Chen ont commencé par l'étude d'objets d'une simplicité absolue : des tas de sable. Ils observent avec soin le sable versé, grain par grain, sur une table, où il se transforme en tas dont la hauteur s'élève. Grâce à des enregistrements vidéo au ralenti et à des stimulations sur ordinateur, ils sont en mesure de compter très exactement combien de grains sont déplacés par chaque grain nouveau qui tombe sur le sommet du tas. Parfois, l'un d'eux déclenche une petite avalanche. Moins souvent, de grosses avalanches se produisent – là encore déclenchées par un unique grain. Mais le potentiel de déclenchement de chaque avalanche, quelle qu'en soit l'ampleur, s'accumule lentement et résulte des impacts cumulés de l'ensemble des grains. Des petits changements reconfigurent le tas de sable. lisle rendent vulnérable à des changements plus importants.

Comme l'indique le sens commun, la plupart des grains n'en déplacent que quelques autres dans leur chute. Ils exercent cependant une profonde influence sur ce qui se passe plus tard. En fait, ils créent la potentialité de changements ultérieurs, petits et grands. De manière étonnante, on peut établir une relation mathématique précise entre le nombre de grains de sable déplacés par chaque grain nouveau et la fréquence à laquelle se produisent les avalanches d'amplitude diverses.

Les états critiques auto-organisés sont un phénomène bien connu des mineurs.

Il est important, toutefois, de noter que cette réaction prévisible du tas de sable à la chute de chaque grain ne peut intervenir avant qu'il n'ait atteint ce que l'on appelle un état critique, dans lequel chaque grain est, physiquement, en contact direct ou indirect avec le reste du tas (les tas de sable ne parviennent jamais à l'équilibre). Mais lorsqu'on a versé assez de sable pour former un tas et qu'il y a contact physique entre tous ses composants, la chute, si faible soit-elle, de chaque grain qui tombe entraîne des "échos deforce" qui se répercutent dans le tas tout entier et amènent certains grains à changer de position, ce qui le reconfigure. Dans ce sens, le tas « se souvient » de l'impact de chaque grain, et le conserve en mémoire de manière holographique, dans la position physique de tous les grains les uns par rapport aux autres et dans sa forme tridimensionnelle. La théorie des tas de sable – celle des états critiques auto-organisés – suggère bien des analogies. On peut commencer par l'appliquer aux différents stades du développement de la personnalité. La formation de l'identité est semblable à celle d'un tas de sable. Chaque personne est unique, et les événements l'affectent différemment. Une personnalité parvient à l'état critique une fois qu'apparaissent ses contours essentiels. Alors, l'impact de chaque événement se répercute dans l'ensemble de la personnalité, directement, quand l'événement se produit, et indirectement, en créant les conditions d'un changement à venir. Étant arrivée à cette configuration de la maturité, une personnalité continue à entasser des grains d'expérience sur ses fondations existantes. Mais parfois, au milieu de l'existence, ces grains commencent à s'empiler, comme si le tas voulait encore grandir, comme si la personnalité recherchait encore sa maturité. La configuration instable à laquelle cela aboutit rend un être humain susceptible de changements en cascade. En termes de psychologie, on appelle cela le changement de mi-vie. C'est une avalanche émotionnelle qui combine les forces des changements ténus et subtils qui se sont accumulés avec le temps. Quand cela se produit – il suffit d'un unique traumatisme pour le déclencher–, ce changement considérable peut mener à une consolidation de la personnalité, laissant intacte l'essentiel de la configuration de la maturité, mais lui donnant plus de masse et plus de poids.

Pour parler de leurs tas de sable, Bak et Chen recourent à un vocabulaire différent. Là où j'écris «période de formation », ils utilisent l'expression « état sous-critique ». Ma « configuration de la maturité » est leur «état critique ». Et quand je fais allusion à des « configurations instables », ils se réfèrent à un « état super-critique» À partir de ces équivalences, il faut retenir l'une de leurs conclusions:

Un tas sous-critique va s'élever jusqu'à ce qu'il parvienne à l'érat critique. Si sa pente dépasse un taux critique – ou état super-critique –, les avalanches auront beaucoup plus d'ampleur que celles qui se déclenchent en état critique. Un tas super-critique s'écroulera jusqu'à ce qu'il soit revenu à l'état critique. Les tas sous-critiques comme les tas super-critiques tendent naturellement vers l'état critique.

L'une des raisons pour lesquelles cette théorie m'a attiré, c'est qu'elle m'a aidé à comprendre les changements intervenus dans ma propre vie. Elle m'a également aidé à supporter le terrible accident arrivé à mon fils et ses suites. Al Gore fait référence à un accident très grave où son fils fut renversé par une voiture; il fut entre la vie et la mort pendant longtemps. Après cette quasi-mort, et nombre de changements qui s'étaient accumulés juste avant, j'avais le sentiment que ma vie était parvenue, comme le disent Bak et Chen, à un état super-critique. Il y avait eu accumulation de trop d'expériences douloureuses. Mais le changement a dévalé la pente de ma vie et je me suis retrouvé dans ce qui m'avait autrefois semblé être la maturité, et qui se révélait plus plein et plus profond. Je regarde maintenant vers l'avenir avec un sens plus clair de ce que je suis et du travail que j'espère accomplir dans le monde.

Le psychologue Erik Erikson a été le premier à systématiser et à décrire les stades de développement par lesquels chacun de nous passe. Il a vu aussi les crises successives et prévisibles que nous traversons quand nous passons d'un stade à l'autre, expliquant qu'elles sont parfois nécessaires pour nous éviter d'être pris au piège d'un conflit non résolu qui nous empêcherait de mûrir. J'ai eu le privilège d'être l'un des étudiants du Pr Erikson, alors que j'en étais à cette période étrange de l'existence où la découverte et la définition de sa propre identité constituent la tâche psychologique fondamental de chacun. Maintenant, à la moitié de ma vie, j'en suis arrivé au point où, selon le mot d'Erikson, la « générativité » devient l'essentiel. C'est l'époque où la plupart des gens, à encroire Erikson et ses disciples, sont prêts à aller au-delà de l'harmonie et de la confiance mutuelle qu'ils ont su instaurer avec leur entourage inunédiat. L'issue victorieuse de ce combat difficile leur donne la capacité de s'intéresser au sort de beaucoup d'autres et le désir de transmettre le flambeau à la nouvelle génération. Ainsi, la générativité apparaît-elle pendant la période ta plus productive et la plus fertile de la vie de chacun : on travaille à se montrer fécond pour l'avenir.

Ces deux analogies peuvent-elle nous aider à définir le stade où se situe l'espèce humaine par rapport à la Terre ? On peut dire, peut-être, que la civilisation a dépassé l'état sous-critique, ou sa période de formation, et qu'elle est récemment parvenue à une configuration de maturité, sous la forme d'une communauté mondiale ou d'un village planétaire. Mais ne serait-elle pas sur le point de connaître une crise de mi-vie ? De plus en plus, les gens éprouvent de l'anxiété devant l'accumulation de changements spectaculaires qui laissent présager des « avalanches » de plus grande ampleur encore dans notre culture et dans notre société, déracinant des institutions comme la famille et ensevelissant des valeurs comme celles qui ont toujours nourri notre souci du futur. Les actions de n'importe quel groupe isolé se répercutent aujourd'hui à travers le monde entier, mais nous paraissons incapables de combler les fossés qui nous séparent les uns des autres. Notre civilisation est-elle bloquée dans un conflit entre les nations, les religions, les ethnies, les systèmes politiques – ou divisée par les sexes, les races, et les langues ? Et maintenant que nous avons la capacité de porter atteinte à notre environnement à l'échelle planétaire, saurons-nous faire preuve d'assez de maturité pour prendre soin de la Terre tout entière ? Ou bien nous comporterons-nous encore comme des adolescents aux pouvoirs tout neufs qui ne connaissent pas leur force et qui sont incapables de renoncer aux plaisirs immédiats ? Sommes-nous, au contraire, à l'aube d'une nouvelle ère de générativité de civilisation, d'une civilisation qui se focalisera sur l'avenir de toutes les générations qui nous succéderont ? Le débat actuel sur le développement « doux » n'est, après tout, qu'un débat sur la générativité. Mais pouvons-nous affirmer que nous sommes réellement prêts à renoncer à notre vision à court terme et à nous projeter dans le long terme?

Répondre à ces questions est difficile, quoique pas impossible, à la fois parce que les changements en cours sont en gestation depuis longtemps et parce que ce qui arrive à la civilisation et au rapport de l'espèce humaine à l'environnement revêt maintenant une dimension planétaire. Si nous en revenons à l'analogie avec les tas de sable, nous devons prendre en considération un phénomène, lui aussi décrit par Bak et Chen, qui complique la prévision, ou même la compréhension, de changements de grande ampleur dans un système critique :

  • Un observateur qui étudie une surface donnée d'un tas de sable peut facilemcnt identifier les mécanismes qui provoquent les mouvements du sable, et il pourra même prévoir si les avalanches se produiront dans un avenir proche. Mais les grandes avalanches demeureront pour lui imprévisibles, quoi qu'il en soit, parce qu'elles sont les conséquences de l'histoire générale du tas tout entier. Quelle que puisse être la dynarnique d'un endroit donné du tas, les avalanches continueront sans cesse de se produire selon une fréquence relative que rien ne peut modifier. Le point critique constitue une propriété inhérente au tas de sable.

Le trou dans la couche d'ozone nous offre, sur ce point, un cas d'école, puisqu'il s'agit d'une conséquence imprévisible d'un système global au sein duquel l'humanité a accumulé dans l'atmosphère des gaz chimiquement dangereux. On avait pu anticiper le phénomène général de la réduction de la couche d'ozone, mais l'« avalanche » soudaine qu'a constituée sa disparition totale au-dessus de l'Antarctique a été une surprise complète. Nous avons heureusement inversé la tendance et supprimé la plupart des CFC et nous pouvons espérer, à l'horizon 2050, une totale rémission de ce problème, à condition bien sûr, de rester vigilants. Bien entendu,le même schéma s'applique au problème, plus grave et plus massif, du réchauffement global : alors que nous rejetons dans l'atmosphère des quantités sans cesse croissantes de gaz inducteurs de l'effet de serre, il devient de plus en plus difficile de croire que les conséquences se limiteront au phénomène aujourd'hui bien compris de l'élévation des températures. Nous pouvons avoir la certitude que des «avalanches» de changements dans les structures climatiques se produiront et persisteront si nous continuons à rendre ce tas de sable-là plus haut et plus gros. En outre, la conjugaison de changements significatifs se produisant presque simultanément accroît dans de grandes proportions le risque d'une catastrophe que nous pourrions encore éviter, comme dans le cas de la couche d'ozone, si nous nous en donnions les moyens.

La menace grandissante qui pèse sur l'intégrité du système écologique planétaire mise à part, les transformations considérables qui affectent la civilisation feront sans doute peser leurs propres menaces sur son intégrité et sur sa stabilité. L'accumulation d'un milliard de nouveaux êtres humains tous les dix ans crée toute une série de problèmes. En elle-même, l'explosion démographique est susceptible de conduire la civilisation mondiale vers un état supercritique, qui la rendra vulnérable à d'énormes « avalanches » de changements imprévisibles. Pour faire face à tous ces dangers, nous devons accélérer notre mouvement vers un nouveau stade de développement, où nous deviendrons capables d'une compréhension mature de notre pouvoir de modeler notre propre avenir. Erikson écrivait : «L'éventualité d'une destruction de toute l'espèce engendre, pour la première fois, la nécessité d'une éthique de l'espèce. »

Quand on envisage un problème aussi vaste que la dégradation de l'environnement planétaire, il est facile de se sentir accablé, complètement impuissant à changer quoi que ce soit. Mais nous devons nous garder de cette réaction, parce que la crise ne trouvera de solution que si des individus prennent la responsabilité de s'y attaquer. En nous éduquant nous-mêmes et en éduquant les autres, en contribuant, chacun à son niveau, à réduire l'emploi et le gaspillage des ressources, en nous montrant politiquement un peu plus actifs pour exiger le changement – ainsi, et de mille autres façons, nous pouvons tous faire bouger les choses. Mais le plus important peut-être, c'est que chacun de nous examine son propre rapport au monde naturel et retisse, au plus profond de lui-même, de nouveaux liens avec lui. Et cela ne pourra avoir lieu que si nous renouons avec ce qu'il y a d'authentique et de vrai dans tous les aspects de notre existence.

Le 20è siècle a mal répondu à l'exigence constante des hommes de donner un sens à leur vie. Deux guerres mondiales, l'Holocauste, l'invention des armes nucléaires et, maintenant, la crise de l'environnement ont conduit beaucoup d'entre nous à se demander si la survie restait possible – sans même parler d'une vie plus éclairée, plus joyeuse, et plus porteuse d'espoir. Nous nous retranchons derrière la séduction des outils et des technologies de la civilisation industrielle, mais cela ne sert qu'à engendrer des problèmes nouveaux, alors même que nous sommes toujours davantage isolés les uns des autres et coupés de nos racines. Le souci que nous avons de nous-mêmes – étroitement définis comme séparés des autres et du reste du monde – finit par devenir la motivation de base qui sous-tend toutes les interactions sociales et jusqu'à la civilisation elle-même. Nous en venons à attribuer plus de valeur à des images-chocs qu'à des vérités reconnues. Nous en arrivons à croire que, face à la perspective d'une disparition de notre espèce, seule importe ce qui flatte l'ego. Mais une telle réaction ne dure pas et laisse place, en définitive, au sentiment que ce qu'il y a de réel et de juste dans nos vies nous échappe. Cette réaction est devenue si répandue qu'elle donne à penser que nous sommes face à une sorte de crise d'identité collective. Depuis plusieurs années, je me suis lancé dans une quête de la vérité sur moi-même et sur ma vie. Biendes hommes et des femmes que je connais font de même. Plus de gens que jamais s'interrogent: «Qui sommes-nous ? Quel sens à notre vie ? » La résurgence de l'intégrisme dans toutes les religions du monde – de l'islam au judaïsme, et de l'hindouisme au christianisme –, la prolifération des mouvements spirituels, idéologies et cultes en tout genre, la popularité des Doctrines du New Age et la fascination actuelle pour les mythes et les légendes : voilà les preuves qui permettent de conclure que la civilisation moderne souffre d'une crise spirituelle née d'un vide et de l'absence de véritable but spirituel.

Peut-être parce que je me suis mis à chercher, simultanément, à mieux comprendre ma propre vie et à savoir ce qu'il était possible de faire pour sauver l'environnement de notre planète, j'en suis venu à croire à une sorte d'écologie intérieure reposant sur les principes mêmes d'équilibre et d'intégrité qui caractérisent un environnement en bonne santé. Par exemple, s'intéresser trop à soi-même semble mener à un certain isolement qui nous prive de la nourriture spirituelle qu'on peut trouver dans la relation avec autrui. À l'inverse, porter trop d'attention aux autres – en excluant ce que l'on comprend mieux dans le secret de son coeur – paraît faire des gens des étrangers à eux-mêmes. La solution réside évidemment dans l'équilibre – l'équilibre entre la réflexion et l'action, entre les soucis individuels et les engagements envers la communauté, entre l'amour pour le monde naturel et l'amour pour notre merveilleuse civilisation. Tel est l'équilibre que je recherche dans ma propre vie. J'espère, avec confiance, que nous trouverons tous le moyen de résister aux inerties nées de toutes les habitudes, de tous les schémas, de tous les dérivatifs qui nous détournent de ce qui est authentique et honnête, et nous font virevolter dans un sens, puis dans un autre, comme sur un manège, jusqu'à ce que nos âmes elles-mêmes en soient malades de confusion.

S'il est possible de redresser le cours d'une vie – et je le crois –,je suis convaincu qu'il faut commencer par la foi qui, pour moi, représente une espèce de gyroscope spirituel qui tourne sur son axe, dans une harmonie stabilisant ce qui est intérieur et ce qui est extérieur. Bien entendu, la foi reste un mot creux tant qu'on ne lui confère pas une signification personnelle. La mienne est ancrée dans mon assurance inébranlable que Dieu est notre créateur et notre appui, dans un rapport intime et profond avec le Christ, et dans la connaissance d'une présence sainte et permanente en tous les hommes, en toutes les formes de vie et en toute chose. Mais je veux aussi réaffirmer ce que les hommes de foi savent apparemment depuis bien longtemps, et que notre civilisation a occulté: c'est qu'il y a, au sein du monde, une puissance révélée. C'est là que se trouve l'essence même de la foi : dans l'humble décision de s'investir corps et âme dans une réalité spirituelle qui nous dépasse. Et je crois fermement que la foi représente la force fondamentale qui nous rend capable de donner à notre vie une orientation et un sens, et de nous y tenir malgré toutes les vicissitudes de l'existence.

Je crois aussi qu'il y a un lien, qu'on perçoit souvent assez mal, entre des choix éthiques qui paraissent mineurs et ceux dont les conséquences visibles sont considérables, et qu'un effort conscient pour respecter des principes justes dans tous nos choix – si minimes soient-ils – constitue lui-même un choix en faveur de la justice dans le monde. Dans le même ordre d'idées, la propension à succomber aux diversions de toutes sortes et à oublier au passage les conséquences de choix mineurs faits de façon inconsidérée ou au mépris de l'éthique rend quelqu'un susceptible de se comporter de la même manière quand il est confronté à un choix majeur. Aussi bien dans nos vies personnelles que dans nos décisions politiques, nous avons le devoir moral d'être attentifs, de résister aux diversions, d'être honnêtes les uns avec les autres et d'accepter la responsabilité de nos actes – tant individuels que collectifs. C'estencore le même gyroscope: il procure l'équilibre, ou pas. Aristote disait : « La vertu est une. »

Pour la sauvegarde de notre civilisation, restaurer l'équilibre qui fait cruellement défaut dans notre rapport à la Terre exige de nous la conviction inébranlable que l'humanité a un avenir. Nous pouvons croire en cet avenir, le rendre possible, le préserver ; ou bien nous pouvons continuer à tourner dans tous les sens, à l'aveuglette, en nous comportant comme si un jour il ne devait plus y avoir d'enfants à qui transmettre notre héritage. À Nous de choisir: c'est Notre Planète qui est en jeu.

Je suis exactement dans le même état d'esprit qu'Al Gore; mais j'en suis là à la fin de ma vie, lui est au milieu de sa vie. C'est qu'il est différent: 8 ans vice président des États-Unis; candidat à la présidence des États-Unis en 2000 contre George.W.Bush, élection qu'il fut très près de gagner - selon moi il aurait fait un meilleur président que BUsh. Dans la force de l'âge, Al Gore a donc encore beaucoup de temps devant lui pour accomplir ce qu'il pense devoir faire. Ces pages montrent la qualité de l'homme. Seul point de désaccord, je ne souscris pas à la fin où il voit la main de Dieu. Peut-être a-t-il écrit cela pour entraîner l'adhésion de ses compatriotes américains? Peu importe, croire ou pas en Dieu comme créateur de notre univers et de notre humanité relève du point de vue de chacun selon son parcours et ses expériences douloureuses ou pas. Le commencement de la vie nous sera sans doute à jamais inconnu. Mais comme Al Gore, je veux croire en l'homme et à sa capacité de s'adapter pour que notre espèce ne disparaisse pas prématurément.

Mis à jour le 15/02/2011