Sur le dilemme "croissance économique indéfiniment" et développement durable; est-ce possible?

Homo sapiens est-il l'alpha et l'omega?... voilà une déclaration qui relève de la foi, que je respecte profondément, mais qui ne relève pas de la science. Pour moi Homo sapiens est un animal comme les autres façonné par des millions d'années d'évolution; au final l'évolution nous a dotés de caractères qui nous ont progressivement permis de nous répandre sur la planète et d'exercer une suprématie sur toutes les espèces du règne animal et végétal et aussi sur le monde minéral. Ces caractères sont la bipèdie, les mains libres, cinq doigts dont le pouce opposable aux quatre autres, cinq sens, un système nerveux et un cerveau qui nous donnent l'aptitude à la parole et au langage. Par le cerveau, les sens et les mains nous réalisons des projets, extériorisations de nos intentions et de notre volonté, par la fabrication d'outils puis d'outils pour fabriquer d'autres outils, et encore d'autres outils qui nous permettent d'agir sur le monde et de façonner notre environnement. Telles sont les bases cognitives de notre science et de notre technique. Il en résulte pour nous une évolution culturelle qui, après être passée par les différentes phases de progression lente puis accélérée, s'est accélérée de façon exponentielle jusqu'à atteindre le stade où nous sommes aujourd'hui. L'évolution culturelle va ainsi des milliers de fois plus vite que l'évolution biologique qui nous façonne tels que nous sommes, c'est à dire identiques à nos congénères d'il y a 80 000 ans, avec la pulsion sexuelle qui nous pousse à la reproduction. Mais pour moi, "croissez et multipliez vous, dominez la terre" sont l'expression de notre orgueil et de notre arrogance.

Les hommes de notre temps sont confrontés à deux problèmes qui n'ont pas de précédent dans l'histoire de notre espèce. Le premier c'est que, de la naissance à la mort, nos contemporains doivent s'accommoder de changements qui, par leur rapidité, défient leur capacité d'adaptation et d'apprentissage. Ces changements engendrent dans les sociétés locales, continentales et planétaire, des tensions à grande échelle, sources de conflits. Face à ces problèmes, la technique que nous avons développée donne les moyens d'engendrer des désastres. La confrontation latente entre les pays industrialisés et les pays sous-développés est la conséquence de l'évolution technique. Elle a créé de profondes disparités entre des populations et, en outre, elle a effacé la distance qui, autrefois, les isolait. Une inquiétude globale naît de cette croissance accélérée et rejoint les vieilles terreurs millénaires auxquelles elle donne, pour la première fois, un fondement rationnel. Nous sommes en effet la première génération humaine, depuis les origines, qui se trouve confrontée aux limites de l'espace et des ressources de la planète et qui constate sa capacité à détruire le milieu dont dépend sa survie et celle de toutes les autres espèces. Le second problème est que nous atteignons un stade où s'amorce un conflit global entre l'évolution culturelle (scientifique et technique) qui nous caractérise et la survie de l'humanité.

Les sources de ce conflit ne se résument pas à une désadaptation de la population humaine aux ressources que peut lui fournir la Terre et aux altérations irréversibles de l'environnement. Un conflit plus immatériel émerge entre le morcellement politique du monde et la capacité de la technique à l'affecter dans sa globalité. De nouvelles formes d'instabilité à grande échelle du système politico-économique se manifestent, formes qui étaient inconcevables avant que n'apparaissent les moyens modernes de transports et de communications. Notre planète est devenue trop petite parce que nous en avons atteint les limites. Cette conjoncture n'a pas de précédent dans l'histoire et la capacité de l'homme à l'affronter est le problème majeur de notre temps et pour les générations futures.

Certes, ce n'est pas la première fois, dans l'histoire de notre planète, que la vie bouleverse la zone où son influence s'exerce, la biosphère. Les immenses bancs de calcaire, les gisements de charbon, de pétrole et de gaz qu'exploite notre civilisation moderne et même l'oxygène de l'air que nous respirons, produit de la vie végétale depuis 3.9 milliards d'années, témoignent de la puissance globale du phénomène vital. Mais l'histoire de la planète nous enseigne aussi que les espèces, et singulièrement les formes de vie les plus complexes, sont sujettes à l'extinction. Il ne reste à peu près rien des végétaux qui peuplaient la forêt carbonifere, les dinosaures ont disparu et, beaucoup plus près de nous, la plupart des espèces animales qui côtoyaient les premières migrations d'Homo.sapiens.sapiens hors d'Afrique se sont éteintes. C'est là le sort banal des espèces, mais pour nous, ce primate supérieur enclin à croire qu'un Dieu l'a fait à son image et qui, dans ses rêves, imagine qu'il lui appartient de peupler les immensités galactiques, se sentir promis à cette fin obscure est un angoissant cauchemar.

La géologie et la paléontologie sciences naturelles, et la théorie de l'évolution de Darwin elle aussi basée sur les sciences naturelles, nous suggèrent que toutes les espèces biologiques connaissent une émergence résultat de la sélection naturelle de l'évolution , une croissance et une extinction qui marque la disparition de leur patrimoine génétique. Chez certaines espèces primitives comme les trilobites (au cambrien il y a 650 millions d'années), plusieurs centaines de millions d'années peuvent séparer le commencement et la fin, mais chez les grandes espèces animales, le délai est généralement plus bref. La plupart des mammifères qui côtoyaient Homo.sapiens.sapiens au cours de la dernière ère glaciaire, mammouth et ours des cavernes, se sont éteints, victimes sans doute de changements climatiques auxquels ils n'ont pu s'adapter ou de la chasse de nos ancêtres. Le voisin le plus proche d'Homo.sapiens.sapiens, l'homme de Neanderthal, a disparu il y a 35 000 ans, achevant